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le 26 août 2022
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Un parcours du combattant qui se termine… à Granada !

Témoignages

« Il faut avoir un chaos en soi pour accoucher d’une étoile qui danse », disait Nietzsche. C’est un peu l’histoire de ce couple d’Arméniens, Suren et Anna Sahakyan, respectivement 40 et 34 ans, dont l’épopée dramatique va trouver un dénouement heureux à Hendaye.

vue générale de port Lesney Suren quitte l’Arménie il y a douze ans ; l’état général de corruption de son pays ne lui permet pas d’envisager l’avenir dont il est porteur. Il part vivre en Russie, à Sotchi, où il rencontre Anna, les deux travaillent dans la restauration. C’est là, pendant l’année des Jeux Olympiques en 2014, que naît Samuil, leur premier enfant. Mais la Russie aussi est dangereuse et cinq ans plus tard, c’est un nouveau voyage, direction la France, via la Biélorussie puis la Pologne. « Chaque jour, pendant dix jours, j’ai dû aller voir si on pouvait passer la frontière, je n’en pouvais plus », se souvient Suren, les larmes aux yeux. Ils finissent par arriver à Poitiers, où ils vont rester un an et demi. Pris en charge par le CADA, Centre d’accueil des demandeurs d’asile, ils commencent alors une autre épopée, administrative cette fois, pour obtenir un statut de réfugiés politiques. Las ! La demande n’aboutit pas et en 2017 l’appartement mis à disposition doit être rendu, pas de titre, pas de logement. Désespérés, avec quelques euros en poche, ils arrivent un jour à la gare de Poitiers sans idée préconçue de destination. Anna est enceinte de 8 mois et il faut trouver un point de chute pour la famille. Suren commente aujourd’hui : « Je réalise qu’on a pris beaucoup de risques. »

Direction : la Côte Basque

Sur le parvis de la gare, le hasard, ou leur bonne étoile, les fait rencontrer une dame qui descend en voiture vers l’Espagne et leur propose un co-voiturage. Les voilà partis vers un nouvel épisode de leur vie. La conductrice les dépose à l’église Sainte-Eugénie à Biarritz, où pendant six mois, la paroisse va s’occuper d’eux. On leur prête une maison et Anna peut accoucher en toute sécurité à l’hôpital de Bayonne. Un enfant né en France, tout un symbole ! Anna est fière de cette naissance à Bayonne, même si elle reconnaît qu’il a fallu se passer des visites et des félicitations qu’on reçoit en pareil cas. Au moins ont-ils un toit sur la tête et Samuil est scolarisé.
Autre bonne fée à se pencher sur la destinée de cette famille, la Cimade qui, en août 2018, va leur proposer une maison à Hendaye. C’est un vrai soulagement, enfin dans leur maison, ils vont pouvoir travailler et refaire leur demande de papiers. Ils obtiendront leur titre de séjour en juin 2021. Anna est la première à trouver un emploi dans une boulangerie d’Hendaye. Elle va y rester plus de trois ans. Suren, lui, travaille un été de nuit à l’usine Epta aux Joncaux, comme monteur de réfrigérateurs. Mais avec les enfants petits et aucune aide familiale, il ne pourra accepter d’être embauché avec des horaires de travail impliquant la journée.

vue générale de port Lesney vue générale de port Lesney De toutes façons, le couple a un rêve, celui d’ouvrir un commerce. Anna se voit fleuriste, mais Suren emportera la décision : ils vont préparer des spécialités et vendre des produits d’Arménie. En décembre 2021, après une formation au GRETA, il obtient son diplôme HACCP (une certification des normes d’hygiène des restaurateurs), qui lui permet d’ouvrir un commerce alimentaire et accessoirement un diplôme de sauveteur-secouriste. Son fils Samuil lui a montré la voie, lui qui pratique le sauvetage côtier à Hendaye pendant ses loisirs. Suren et Anna réussissent l’épreuve de Français du contrat d’intégration lors d’un examen à Bordeaux le 1er août de cette année, avec les félicitations dues aux bons élèves. Leur niveau, A2, est suffisant pour obtenir une carte de résident de 10 ans. S’il veut la nationalité française, il lui faudra le niveau B1. Il restera encore un stage de trois jours à la rentrée, à Pau, sur les subtilités de la législation française pour terminer leur contrat d’intégration.

vue générale de port Lesney vue générale de port Lesney Pendant cinq mois, le couple peaufine ses recettes. Leur meilleure trouvaille selon eux, atteinte au bout de longues séries d’essai/erreur ? Des crêpes de couleur verte (épinards) et rouge (betteraves) ! Les associations hendayaises se sont mobilisées en faveur de la famille Sahakyan, depuis leur arrivée dans la ville. La Cimade, Baleak, et dernièrement Bidasoa Etorkinekin, qui a avancé l’argent pour acheter le matériel de cuisine en attendant que la banque débloque le prêt et dont certains bénévoles continuent de prêter main-forte à l’occasion. Car le temps a été compté pour que Suren et Anna puissent profiter de la saison. Le bail pour le local de la rue des Pins est signé le 1er août, il a fallu nettoyer, enlever les miroirs et les cabines du local qui était, il y a longtemps, magasin de vêtements, installer un ilôt pour le lavage, remettre en état le cumulus, etc. avant d’enfin ouvrir leur magasin « Granada » au public. C’est chose faite depuis dimanche 7 août 2022. Leur ténacité aura porté ses fruits. « Il paraît que nous avons des points communs avec les Basques : 2 000 mots de vocabulaire et un caractère têtu ! », s’amuse Suren. Le couple et ses deux enfants « qui n’ont jamais cesser de prier », vont peut-être enfin pouvoir se mettre à danser comme des étoiles…
Il reste à résoudre le problème de la garde des enfants le week-end, à la reprise de l’école (appel aux bonnes volontés).

Témoignage recueillit le 25/08/2022 par MG
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